lundi 6 juillet 2009

Romans olipotiens

- Ecrire un roman qui n'aurait qu'une seule phrase.
- Ecrire un roman donc chaque phrase n'aurait qu'un mot.

mercredi 1 juillet 2009

Les mondes multiples

Dans les lapins de M. Shrödinger, Colin Bruce écrit: "Le trait principal des mondes multiples (qui donnent selon l'auteur la meilleure explication à certains résultats paradoxaux de la physique quantique) [...] est l'immensité de la multiplicité qu'implique la théorie" et il cite Paul Davies "si la théorie des mondes multiples obéit au rasoi d'Ockham par son économie d'hypothèses, elle est immensément extravagante dans le nombre de monde qu'elle sous-entend." Puis il ajoute "Est-il plus sensé de préférer moins d'hypothèses ou moins de monde invisibles?" (1)

Colin Bruce répond à cette opposition majeure à la théorie des multivers (lui-même l'a qualifié, nous l'avons vu, de trait principal) en présentant "d'excellents précédents demontrant l'intérêt qu'il y a à préférer l'économie d'hypothèses à l'économie de monde". Il énumère alors la conception d'un univers ou les étoiles étaient des taches de lumière stable à la conception d'un univers où les étoiles sont elles-mêmes autant de soleils avec - potentiellement - leurs propres planètes, puis de la conception d'un univers limité à notre galaxie à un univers contenant des milliards de galaxie.

Il conclue: "accepter la réalité des mondes multiples de la théorie quantique représente seulement un barreau supplémentaire sur l'échelle que nous avons déjà commencé à gravir".


Pardon, mais il y a là une différence, et de taille, je dirais même plus : d'infini !

Lorsque l'on passe d'une suite finie de nombre naturelle finie à la suite infinie de ces nombres, le pas a franchir est certes considérable mais après tout, il ne représente pour l'esprit qu'une hypothèse de d'extension.

De même dans les exemples de Mr Bruce, on trouve un simple phénomène d'extension à un infini (ou quasi infini) dénombrable.

Mais la théorie des mondes multiples révolte les sens car elle a la propriété du continu: On doit en effet imaginer qu'à chaque instant, aussi petit qu'on puisse l'imaginer, une décohérence se produit pour chacune des particules de l'univers qui par sa propre interaction avec une autre particule ou un champ pourrait révéler quelque chose de sa position ou de sa vitesse. Mais ce processus est étendu à chacune des particules qui ont eu à un moment donné une certaine "proximité" avec cette particule, c'est à dire, s'il l'on accepte la théorie du big bang, toutes les autres car réveler quelque chose de l'une d'elle révèle quelque chose de toutes les autres. La décohérence a donc la puissance du continu et crée des univers au rythme minimum de 10^81 non pas même par seconde ou par millième de seconde, mais continuellement. Et c'est un minimum car les univers peuvent être plus que dédoublés.

Il y a là plus qu'un barreau à franchir, n'en déplaise à Mr Bruce. Cette profusion s'oppose bien au rasoir d'Occam, l'un des trois piliers des théories scientifiques (2).


Pour une fois je serai d'accord avec la majorité : si plus de cinquante pour cents des spécialistes du domaine ne s'en déclarent pas partisans (3) (sans être partisans d'une autre explication) c'est qu'elle a quelque chose de particulièrement difficile à avaler, qui perturbe les physiciens; pourtant souvent prompt à accepter l'inattendu : les débuts de la théorie quantique n'ont pas soulevé une telle vague de scepticisme. Il y a ici quelque chose de dérangeant et avant d'affirmer que cette interprétation est la bonne (ou plus exactement en la meilleure de toutes les bonnes interprétation selon M. Bruce), il faudra d'abord nous prouver que des solutions moins dérangeantes sont impossibles. Je serai quant à moi en effet prêt à laisser tomber la relativité restreinte plutôt que d'admettre ces mondes trop multiples.


1. Colin Bruce, Les lapins de Mr Schrödinger, Edition du Pommier, p. 203.
2. Avec le "principe de Copernic" (principe de médiocrité : l'histoires des particules qui nous sont proches n'est pas privilégié par rapport à celles du reste de l'univers) et "le principe de localité" (pas de force qui puisse s'appliquer instantanément à distance et dont l'effet serait de nous interdire de comprendre l'univers).
3. p.199.