dimanche 24 février 2008

En solidarité avec Kurt Westergaard

Le 12 février dernier, la police danoise arrête trois hommes (deux tunisiens et un danois d'origine marocaine) suspectés de planifier l'assassinat de Kurt Westergaard, le dessinateur de la caricature "la bombe dans le turban".

Le jour suivant, Jyllands-Posten ainsi que beaucoup d'autres journaux danois réimpriment la caricature en solidarité, comme nous le faisons sur ce blog.

Une abondante littérature existe sur la publication de ces caricatures. Nous renvoyons le lecteur au très bon article de Wikipedia en français [1] sur les possibles instigateurs des réactions soulevées dans le monde musulman et de leurs motifs et nous nous bornerons seulement à un inventaire non exhaustif :

Les victimes :
  • Le 30 janvier 2006, le chef spirituel des Frères musulmans appelle les musulmans du monde « à boycotter les produits du Danemark et de la Norvège, et à prendre des mesures fermes. » La population saoudienne entame alors un boycott des produits danois, en signe de protestation contre ces dessins et, dans la région du Golfe, plusieurs supermarchés ont retiré les produits alimentaires danois des étals à la suite de plaintes de clients. La Fédération des industries danoises précise que les entreprises danoises menacées par ce boycott sont le groupe laitier Arla Foods, pharmaceutique Novo Nordisk, le fabriquant de pompes Grundfos et les jouets Lego.
  • Les responsables de Magazinet et de Jyllands-Posten et les caricaturistes reçoivent des menaces de mort à la suite de la publication des dessins. Jyllands-Posten doit évacuer son siège d'Aarhus (centre du pays) et sa rédaction de Copenhague, en raison d'une alerte à la bombe. De son côté, la Croix-Rouge danoise a annoncé l'évacuation de deux de ses employés de Gaza et d'un du Yémen.
  • France-Soir est le seul journal français à publier les dessins le 1er février 2006. Jacques Lefranc, président et directeur de la publication limogé le jour même. Son remplaçant, Éric Fauveau, démissionne le lendemain.
La peur :
  • Libération: « les dessins nous ont semblé d'un niveau médiocre, tant sur le fond que dans la forme, et aucun d'entre nous n'a eu envie de les voir dans notre journal ». Libération publiera plus tard deux caricatures.
  • La presse duRoyaume-Uni prend la décision volontaire et unanime de ne pas publier les caricatures afin de ne pas attiser un climat de défiance envers les différentes communautés du Royaume, cela, en dépit de la crise qui agite d'Europe.
  • A noter que l'édition française de Wikipédia relatif aux caricatures ne présente pas les caricatures à ce jour, alors que l'édition anglaise les publie. A ce jour, sur les 30 langues où un article est disponible sur le sujet, seules 7 d'entre elles proposent une reproduction des caricatures : l'anglais, le gallois, l'hébreux, le luxembourgeois, le serbo-croate, le vietnamien et le chinois traditionnel.
Les opportunistes :
  • Le groupe suisse Nestlé fait publier à la une du quotidien panarabe Asharq al-Awsat une publicité précisant que son lait en poudre n'était « ni produit au Danemark, ni importé du Danemark »
  • La chaîne d'hypermarchés Carrefour cesse de distribuer des produits danois dans les pays du Moyen-Orient où elle est implantée. Des panneaux placés dans ces supermarchés et dans les rues de nombreuses villes arabes annoncent (par exemple en Égypte) : « Chers Clients, Nous exprimons notre solidarité avec la communauté islamique égyptienne. Carrefour ne vend pas de produits danois ».
  • Le porte-parole du département d'État américain, Justin Higgins […] déclare : « Ces caricatures sont évidemment blessantes pour les croyances des musulmans. […] L'incitation à la haine religieuse et ethnique n'est pas acceptable. […] Nous reconnaissons tous et nous respectons complètement la liberté de la presse et de l'expression, mais elle doit s'accompagner de la responsabilité de la presse » ce qui semble pour le moins curieux lorsqu'on se rappelle qu'un autre porte parole, Scott McClellan, rappelait quelques mois plus plus tot que «les Etats-Unis sont pilotes pour promouvoir et défendre la liberté et l’indépendance de la presse dans le monde et le resterons» lors du scandale sur la désinformation organisée en Irak[2].

La grandeur :
  • L'éditorialiste de France-soir écrit au sujet de la publication des caricatures :« Non, nous ne nous excuserons jamais d'être libres de parler, de penser, de croire… Puisque ces docteurs autoproclamés de la foi en font une question de principe, il faut être ferme. Clamons-le autant qu'il le sera nécessaire, on a le droit de caricaturer Mahomet, Jésus, Bouddha, Yahvé et toutes les déclinaisons du théisme. Cela s'appelle la liberté d'expression dans un pays laïque. »
  • L'ancien grand mufti de Marseille, Soheib Bencheikh, déclare « je trouve inadmissible de rester l'otage d'une horde de fanatiques qui, au lieu de répondre par le dialogue, répondent par la violence » a-t-il affirmé, expliquant que « c'est grâce à la liberté d'expression que l'islam se défend, que moi-même je peux à tout moment et quand je veux exposer mon message ».[3]

[1]. Toutes les citations de cet article sauf mention contraire sont tirées de Wikipedia, "Caricatures de Mahomet du journal Jyllands-Posten", version du 23 février 2008 à 18:02 Salebot.
[2]. Olivier Péguy, "une « désinformation » organisée", RFI , 03/12/2005.
[3]. Nous invitons les lecteurs à proposer d'autres références pour chacune des catégories.

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