vendredi 1 août 2008

L'imaginaire des sociétés occidentales

Toutes les sociétés utilisent majoritairement leur passé, historique ou non, dans la construction de leur imaginaire collectif. Ce passé peut soit servir de référence comme valeurs fondatrices, souvent supposées corrompues au moment ou l'auteur s'exprime, soit servir de cadre à des héros aux préoccupations plus contemporaines et servir ainsi à faire accepter ou à mettre en relief ses propos. Ainsi, les Grecs étaient passoionnés par leur mythologie fondatrice, et les Romains aimaient à citer Enée et les héros de la République, Les hommes du Moyen Age s'intéressaient aux héros de la table ronde, la Renaissance et le Classicisme au source de leur civilisation que le XIXème siècle occidental chercha dans d'autres traditions germaniques ou chevaleresque.(1)

Mais le XIXème marque également un tournant, avec, avec pour la première fois, dès le second quart du siècle (2) mais surtout dans ses 30 dernières années(3), la tentative commune aux artistes de premier plan de dresser un panorama complet de la société contemporaine(4). Transition qui s'ouvre sur les débuts de l'exotisme, de l'anticipation du fantastique(5) et débouche, dans la seconde partie du XXème siècle, sur un regard majoritairement tourné vers le présent et le fantastique (6).

La rencontre de ces deux antagonistes est a priori assez déroutante. L'une évoque le quotidien, l'autre l'évasion. On peut imaginer que la force de l'évasion est plus forte quand elle est mêlée à notre univers quotidien mais c'est la une expliation parmi d'autre. Ce qui importe, c'est que c'est un phénomène à la fois massif et tout à fait particulier à notre société occidentale moderne.

En effet, elle est très peu présente dans les oeuvres orientales(8) à l'exception notable du Japon(9), toujours très imprégné du passé et n'abordant le présent qu'avec prudence.

On soulignera que la différence est de taille: les héros du passé forment un imaginaire collectif qui à la fois inspire mais conditionne. Le fantastique ouvrent a priori sur une liberté plus grande ou l'individualité, le moi, peut être valorisé à l'extrême dans le personnage de super-héro. Et pourtant, tous les héros se ressemblent beaucoup (10) refermant ainsi de manière particulièrement frustrante la liberté d'invention qui vient de s'ouvrir.

On pourra également trouver dans l'évolution de l'imaginaire collectif brièvement décrit plus haut, un critère soutenant des termes souvent employés sans fondement pour caractériser des sociétés : Classique (imaginaire collectif tourné vers le passé), Moderne (tourné vers le présent), Post-Moderne (tourné vers le fantastique). Mais je tiens à souligner que le terme d'Evolution doit être pris dans un sens proche de celui qu'entendent les spécialistes en Biologie. Rien dans ce qui est décrit ici ne justifie que cette évolution soit moralement positive. Il ne s'agit ici que de clarifier une dénomination servant à définir un stade de société, si tant est que les sociétés passent par ces mêmes stades, ce qui me parait encore à vérifier. Se pourrait-il en effet qu'emergent en Chine en Inde ou dans les pays du Golf des sociétés technnologiquement avancées à l'imaginaire collectif encore tourné vers le passé ?

--- Notes ---

(1) On pourra reprocher le parti pris de ce paragraphe sans d'avantage d'explication. Je ne souhaite pas transformer cet article en un article scientifique mais je vais exposer ici un moyen de vérifier mes affirmations. je propose en effet l'utilisation d'un crible que je détaillerai dans le prochain post.

(2) Notamment avec Honoré de Balzac et sa Comédie Humaine,

(3) Une foule de nom surgissent à l'esprit: Le naturalisme en littérature, le réalisme, puis l'impressionisme en peinture.

(4) La difficulté d'une telle affirmation tient évidemment dans qui considère-t-on comme un artiste majeur. Le XIXème siècle à produit jusqu'à son extrême fin des oeuvres très "classiques" dans leur facture (ce que j'appelle ici des oeuvres faisant appel au passé) qui furent très célèbres en leur temps et c'est notre lecture tardive et sélective qui nous fait apparaître la production des oeuvres tournée vers le présent comme celles de premier plan. Mais nous pouvons nous convaincre que quel que soit la place que ces artistes occupaient dans le volume de production de leur époque, ils ont été les plus influents sur le devenir de la création artistique, méritant ainsi l'appellation de "majeur". Je me bornerais ici à démontrer ce que j'avance pour le virage pris par la société occidentale mais on pourrait facilement créer un crible semblable à celui que je mets en place pour en faire une vérification avec les auteurs de chaque période.

(5) On pense par exemple à Pierre Loti, Jules Vernes et le Maupassant du Horla.

(6) [In 2007] Nine of the Top 10 grossing films were science fiction, fantasy or animation.
http://www.nytimes.com/2008/01/02/movies/02year.html
Voir à ce sujet le crible analysé dans le prochain post.

(7)

(8) On prendra pour exemple que les premiers films chinois au box office pour l'annee 2007 sont: The Warlord, un film situé pendant la dynastie des Tang et Lust, Caution un film reconstituant l'athmosphère des années 30.
http://news.xinhuanet.com/english/2008-01/08/content_7386466.htm

(9) Notamment par le poids des Mangas dans l'imaginaire Japonais.

(10) Je pense ici bien évidemment au stérotypes du cinéma américain alors que les mangas japonaises, bien que n'était pas dénués de stéréotypes (la jeune fille à la lisière de l'adolescence comme héroïne), offrent des espaces imaginaires de masse bien plus riches. Voir par exemple les films de Miyasaki.

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